<\/figcaption>Marie-Madeleine Durufl\u00e9 et Sarah Soularue <\/br>(1979) cr\u00e9dit : collection Soularue \n<\/figure>\n<\/div>\n
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\nLes exigences de Marie-Madeleine en mati\u00e8re de technique \u00e9taient nombreuses et quelquefois surprenantes. L’articulation devait \u00eatre impeccable, le l\u00e2cher de chaque note \u00e9tant aussi important que son attaque. Il est impossible sans avoir eu le privil\u00e8ge de l’observer \u00e0 la console d’imaginer la pr\u00e9cision de son jeu y compris dans les \u0153uvres les plus virtuoses du r\u00e9pertoire. En d\u00e9pit de cette virtuosit\u00e9 \u00e9bouriffante, elle s’astreignait elle-m\u00eame au travail dans l\u2019extr\u00eame lenteur. A cet \u00e9gard, je me souviens de l’avoir surprise, alors que je m’appr\u00eatais \u00e0 sonner \u00e0 la porte du studio, au travail d’un petit choral de l’Orgelb\u00fcchlein au m\u00e9tronome \u00e0 60 \u00e0 la double croche… La tenue \u00e0 la console devait \u00eatre d’une sobri\u00e9t\u00e9 absolue, tout mouvement inutile \u00e9tant \u00e0 proscrire. Elle exigeait que l’on puisse jouer avec le huit-cents gr\u00e9gorien en \u00e9quilibre sur la t\u00eate sans le faire tomber ! Au titre des surprises que pouvaient r\u00e9server son enseignement, je me souviens \u00e9galement d’un cours que j’abordai avec la confiance que conf\u00e8re un travail pr\u00e9alable assidu sur une pi\u00e8ce nouvelle. Alors que je venais de m’asseoir sur le banc, Marie-Madeleine me demanda d’embl\u00e9e de transposer la pi\u00e8ce un demi-ton plus haut. Elle pouvait \u00e9galement demander de soustraire une voix de l’ex\u00e9cution d’une polyphonie et de la chanter. Elle insistait sur le fait que l’organiste, contrairement au pianiste qui joue un instrument tout \u00e0 fait normalis\u00e9, doit faire face \u00e0 des instruments tr\u00e8s divers \u00e0 l’\u00e9tat d’entretien variable et disposer par cons\u00e9quent d’une marge de s\u00e9curit\u00e9 consid\u00e9rable pour compenser cette difficult\u00e9 suppl\u00e9mentaire.\n<\/p>\n
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\nTr\u00e8s pieuse, Marie-Madeleine consid\u00e9rait comme un sacerdoce la fonction d’organiste liturgique. Elle insistait pour que le choix des \u0153uvres \u00e9crites jou\u00e9es pendant l’office corresponde parfaitement au calendrier liturgique. Elle portait une attention particuli\u00e8re \u00e0 ne pas faire attendre le c\u00e9l\u00e9brant par des interventions d’orgue trop longues, privil\u00e9giant pour cette raison l’improvisation sur les pi\u00e8ces \u00e9crites lorsqu’elle estimait que le temps imparti \u00e0 l’orgue \u00e9tait trop court. Confront\u00e9e \u00e0 des choix de cantiques qui laissaient bien souvent une large place \u00e0 des rengaines indigentes, elle s\u2019effor\u00e7ait toujours d’att\u00e9nuer leur banalit\u00e9 par la richesse de ses accompagnements.\n<\/p>\n
\nAu sommet de son art, elle fut frapp\u00e9e ainsi que son mari par un terrible accident de voiture en mai 1975. Apr\u00e8s de nombreuses op\u00e9rations et une r\u00e9\u00e9ducation de 10 mois en thalassoth\u00e9rapie \u00e0 Granville, elle reprit progressivement son service au grand orgue de Saint-\u00c9tienne-du-Mont avec beaucoup de volont\u00e9 et de courage. Organiste suppl\u00e9ante \u00e0 cette \u00e9poque, j’avais assur\u00e9 la plus grande partie du service du grand orgue depuis l’accident. Je continuai bien entendu \u00e0 aider la reprise de Marie-Madeleine du mieux que je pus en me rendant disponible \u00e0 chaque fois que la fatigue ou les douleurs ne lui permettaient pas de monter \u00e0 la tribune. Pendant de longs mois, nous nous r\u00e9part\u00eemes ainsi les offices gr\u00e2ce \u00e0 un rendez-vous t\u00e9l\u00e9phonique hebdomadaire. Cette p\u00e9riode fut tr\u00e8s difficile car elle devait non seulement travailler \u00e0 sa r\u00e9\u00e9ducation organistique mais aussi beaucoup s’occuper de son mari dont les s\u00e9quelles de l’accident avaient partiellement \u00f4t\u00e9 l’autonomie. Ce n’est qu’apr\u00e8s le d\u00e9c\u00e8s de Maurice Durufl\u00e9 en 1986 et \u00e0 la suite de plusieurs op\u00e9rations qu’elle retrouva pleinement ses moyens de virtuose. De 1989 \u00e0 1994, elle encha\u00eena concerts et classes de ma\u00eetre tant en France qu’aux \u00c9tats-Unis.\n<\/p>\n
\nMais des s\u00e9quelles de l’accident de 1975 n\u00e9cessit\u00e8rent de nouvelles op\u00e9rations et sa sant\u00e9 se d\u00e9grada. Apr\u00e8s un s\u00e9jour estival dans sa ch\u00e8re maison de M\u00e9nerbes dans le Vaucluse, elle s’\u00e9teignit \u00e0 Louveciennes le 5 octobre 1999.\n<\/p>\n
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<\/figcaption>Sarah Soularue <\/br>cr\u00e9dit : collection Soularue \n<\/figure>\n<\/div>\n
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\nPlus de vingt ann\u00e9es se sont \u00e9coul\u00e9es depuis sa disparition mais elle demeure pour moi l’exemple lumineux qui continue de m’inspirer non seulement sur le plan musical mais aussi par sa force spirituelle qui se manifestait par une confiance et une joie de vivre communicatives.<\/p>\n
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